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La moitié des Français croient aux théories du complot

Ces thèses séduisent avant tout les électeurs des extrêmes politiques, selon une étude d'ampleur révélée par "Le Monde".

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Publié le 03 mai 2013 à 10h01, modifié le 03 mai 2013 à 15h43

Temps de Lecture 4 min.

Pour la moitié des Français, "ce n'est pas le gouvernement qui gouverne" car "on ne sait pas en réalité qui tire les ficelles". Vieilles histoires que celles des théories des complots en tout genre qui fleurissent, puis vont et viennent au gré et de l'actualité et des moyens de communication.

Pour la première fois, une étude d'ampleur, dont Le Monde a la primeur, a été réalisée en France pour savoir qui sont les adeptes des théories conspirationnistes et quels groupes sont soupçonnés de manoeuvrer en coulisse pour dominer un secteur, voire le monde entier. L'étude a été lancée dans plusieurs pays par le think tank britannique Counterpoint ; elle a été financée par l'Open Society, la fondation du milliardaire américain George Soros.

Cette enquête a été menée en marge de la traditionnelle enquête postélectorale du Centre de science politique de Science Po, le Cevipof. Deux questions ont été ajoutées à celles, plus classiques, concernant les revenus, la composition du foyer ou les votes aux dernières élections. Elles ont été posées, en mai 2012, par Opinion Way à quelque 2 500 personnes.

Les résultats que nous publions montrent que l'adhésion aux différents énoncés conspirationnistes varie davantage en fonction de l'orientation politique qu'en fonction d'autres facteurs comme le niveau d'éducation, ce qui a plutôt surpris les auteurs de l'étude.

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"DÉTERMINANTS POLITIQUES"

"Il existe beaucoup de travaux sur le conspirationnisme en histoire des idées ou en psychologie sociale, mais pas, à notre connaissance, d'étude toute simple sur les gens qui croient à ces théories, sans les considérer comme une pathologie", avance Joël Gombin, doctorant en sciences politiques à l'université d'Amiens, qui a rédigé, au début de l'année, l'analyse de ces données pour le compte de Counterpoint. "Les déterminants ne sont pas aussi mécaniquement liés au niveau d'éducation qu'on le pensait. Le niveau d'éducation joue, mais pas autant que les déterminants politiques qui sont extrêmement puissants."

Il apparaît que 22 % des sondés sont "totalement d'accord" avec l'énoncé, "Ce n'est pas le gouvernement qui gouverne la France ; on ne sait pas en réalité qui tire les ficelles" et 29 % sont "plutôt d'accord". Une courte majorité, 51 %, approuve donc l'énoncé, présenté sous la forme d'une question basique, et rédigée de telle sorte qu'elle soit suffisamment large pour "saisir une attitude générale".

Les résultats varient à peine selon l'âge, le sexe ou le lieu de vie des sondés. En revanche, l'adhésion à l'énoncé est très sensible chez les personnes qui se définissent elles-mêmes comme d'extrême gauche ou d'extrême droite. Cette proximité avec les extrêmes politiques se traduit par une forte adhésion à l'énoncé de ceux qui ont voté, à la présidentielle, pour Marine Le Pen et – dans une moindre mesure – pour Jean-Luc Mélenchon.

Ainsi, 72 % des personnes interrogées qui disent avoir voté pour Marine Le Pen considèrent, à des degrés divers, que "l'on ne sait pas qui tire les ficelles". Par comparaison, ils sont 58 % chez les abstentionnistes et 56 % chez les électeurs de Jean-Luc Mélenchon.

"Il existe une logique d'intégration au système politique, analyse Joël Gombin. Il y a d'un côté les partis politiques présentés comme légitimes, et de l'autre ceux qui ne le sont pas. L'électorat de Jean-Luc Mélenchon est à mi-chemin, mais celui de Marine Le Pen est clairement en opposition au "système". Il existe quelque chose de commun entre les théories conspirationnistes, qui consistent à mettre le doute sur ce qui est communément admis, et cette opposition au système."

Cette corrélation entre d'un côté un vote d'extrême droite ou de gauche radicale et de l'autre les thèses conspirationnistes se vérifie dans la suite de l'enquête, qui a consisté à demander si tel groupe ou tel autre est à même de "tirer les ficelles".

Toute tendance politique confondue, les trois quarts des sondés estiment que c'est la finance internationale qui dirige le monde. Un monde qui serait également aux mains des médias – un énoncé auquel adhérent près de 45 % des sondés – et de pays étrangers en mal de domination – pour 44 % d'entre eux. Viennent ensuite la conspiration ourdie par des "groupes secrets tels que les francs-maçons" (27 % d'approbation) et "certains groupes religieux" (20 %).

En dehors de la question sur la finance internationale, c'est parmi les électeurs de Mme Le Pen que l'on est le plus à même de croire à ces théories, et en premier lieu à celles selon lesquelles un groupe secret comme les francs-maçons ou certains groupes religieux cherchent à diriger le monde.

 Ce type d'étude est monnaie courante aux Etats-Unis – on y apprend que 28 % des sondés croient à un "nouvel ordre mondial" qui s'apprête à diriger la planète. Mais c'est une première en France, qui permet d'esquisser le portrait de celles et ceux qui croient en ces théories. Prochaine étape : Counterpoint envisage d'étudier les relations et les liens entre les différentes théories du complot.

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